La Mort de Balzac et la 628-E8

Auto-censure et curiosité bibliophilique

Objet littéraire très étrange que ce roman d’Octave Mirbeau, La 628-E8. Publié en 1907 chez Fasquelle, l’ouvrage (dont le titre vient du numéro d’immatriculation de l’automobile Charron que possedait l’auteur) raconte les périgrinations d’Octave Mirbeau dans le Nord de l’Europe (Nord de la France, Belgique, Hollande, Allemagne).

Bien entendu, l’anecdote concernant la mort de Balzac est connue. Pour se la remettre en mémoire : trois chapitres de l’ouvrage ont été enlevés alors que l’impression était terminée. Il s’agit des trois chapitre sur la Mort de Balzac, dans lequel Octave Mirbeau raconte que pendant l’agonie et les derniers instants du grand romancier, sa femme, l’actrice Ewelina Hanska, « se donnait du bon temps » avec son amant, le peintre Jean Gigoux.
Il s’agissait, pour Octave Mirbeau, de proposer une vision personnelle de la guerre des sexes, tout en se vengeant par la même occasion de sa femme, Alice Regnault (elle aussi actrice).
Mais devant les menaces de procès émanant de la fille de l’actrice, l’auteur résolut de supprimer ces pages de son ouvrage.

Et c’est ici que se situe une curiosité bibliophilique peu connue.
En effet, on trouve quelques très rares exemplaires possédant encore les fameux chapitres, bien à leur place. Ces exemplaires ont généralement des propriétaires prestigieux, car Octave Mirbeau, refusant de voir disparaître ces chapitres, commanda l’impression d’un petit nombre de copies, qu’il joignit aux ouvrages offerts à ses amis. Ces ouvrages sont reconnaissables à la numérotation des trois chapitres incriminés, dans une pagination propre, en dehors de celle de l’ouvrage lui même.
Mais il y a aussi un encore plus petit nombre d’exemplaires qui possèdent une numérotation continue. Ces derniers ont semble-t-il été détournés juste à la sortie de l’impression, avant que ne soient retirés les trois chapitres. Ils sont les seuls à représenter l’ouvrage dans l’état réellement voulu par l’auteur.

Cette amusante petite curiosité nous a été révélée par un Mirbaldien convaincu, de nos bons clients et amis, Gaël Lagadec. Qu’il soit remercié de ses lumières.

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