11 Août 2018
La « Jazz-o-thèque » d’Abraxas-Libris
En tant que courant musical né parmi les Afro-Américains du Sud des États-Unis, le Jazz est l’un des plus fascinants mouvements artistiques du XXème siècle, à la fois support d’expression d’un peuple opprimé et vecteur d’une légitime contestation sociale.
Nourri d’influences africaines mélancoliques, issues d’un peuple traumatisé par l’horreur de l’esclavage et l’arrachage inhumain de la terre de leurs ancêtres, le Jazz, creuset de la culture noire, prit véritablement son essor au cours de la décennie 1910-1920, par le biais du fameux Dixieland de la Nouvelle-Orléans, ville-matrice où se concentraient diverses cultures symbiotiques (créole, cajun, africaine, espagnole et française). De cet exceptionnel camaïeu de gens et de civilisations diverses, le mouvement Jazz éclot ainsi qu’une émouvante fleur façonnée par la souffrance et la volonté de vivre. Coupés de leurs origines, vivant dans un État de non-droit où ils enduraient quotidiennement les plus révoltantes discriminations, les Afro-Américains utilisèrent, semble-t-il, la musique Jazz pour transcender leur malheur collectif et donner un sens à leur existence oppressée. Le célèbre chanteur Bob Marley a un jour écrit : « La chose superbe à propos de la musique, c’est que lorsqu’elle vous touche, vous ne ressentez plus la douleur. » On ne saurait mieux dire. Une scène issue d’un film populaire, « La Couleur Pourpre » (inoubliable film de Spielberg, avec la non moins inoubliable Whoopi Goldberg), illustre à merveille le sens de ce propos. Lors de la scène du cabaret, où l’exubérante et charismatique chanteuse Shug Avery (sublimement campée par Margaret Avery) interprète plusieurs morceaux de Jazz, l’on peut voir clairement que le public présent (uniquement composé d’Afro-Américains) échange pour un soir la tristesse de son quotidien contre un peu de rêve, d’émotion et de tendresse méritée – notamment avec le personnage de Celie jouée par Whoopi Goldberg.
La chanson-phare du mouvement Jazz, son morceau « culte » pourrait-on dire, qui l’incarne dans son essence la plus intime, est sans contestation possible « Strange Fruit » de Billie Holiday, parue en 1939 (et reprise de manière convaincante par le groupe anglais Siouxsie and the Banshees en 1987, dans leur album « Through the Looking Glass »). Bouleversante au possible, la chanson évoque ce « fruit étrange » (strange fruit en anglais) qu’était le cadavre d’un Noir laissé, plusieurs jours durant, pendu à un arbre public (scène hélas très fréquente aux États-Unis jusque dans les années 1960, suite aux odieux lynchages perpétrés par le Ku Klux Klan, de sinistre mémoire, avec la complicité passive des autorités locales). Rappel éternel de cette époque violente, l’on peut encore trouver, dans certaines brocantes des États-Unis, d’horrifiantes « cartes postales » d’époque, glaçantes à souhait, montrant des foules pimpantes de Blancs en complet-veston, souriant de toutes leurs dents en posant devant le corps d’un être humain noir pendu au bout d’une corde. Plus que tout autre morceau de Jazz, la chanson déchirante de Billie Holiday exprime cette volonté farouche du peuple Afro-Américain de transcender la tragédie collective de son histoire, et surtout ne pas permettre qu’elle soit oubliée.
Fidèle à sa volonté de promouvoir toutes les cultures du monde, la Librairie Abraxas-Libris propose, dans l’espace musique de sa pochothèque, une large variété d’albums des plus grands artistes de Jazz. Billie Holiday, mais aussi Ben Webster, Kenny Dorham, Miles Davis et bien d’autres vous attendent sous format CD, afin de vous faire découvrir l’immensité de leurs talents musicaux.
8 Sep 2018
0 Comments
Les aventures de Tintin en noir et blanc
Lorsqu’on prononce les mots « Tintin en noir et blanc », le grand public pense immanquablement à « Tintin au Pays des Soviets » paru en 1930. Et pourtant, entre 1931 et 1941, ce ne sont pas moins de huit albums de Tintin qu’Hergé a fait éditer en format noir et blanc : « Tintin au Congo » (1931), « Tintin en Amérique » (1932), « Les Cigares du Pharaon » (1934), « Le Lotus Bleu » (1936), « L’Oreille Cassée » (1937), « L’Ile Noire » (1938), « Le Sceptre d’Ottokar » (1939), et enfin « Le Crabe aux Pinces d’Or » (1941), épisode fameux entre tous, puisqu’il marque la première apparition du Capitaine Haddock dans l’univers de Tintin.
En dehors du cercle des collectionneurs chevronnés, d’aucuns pourraient se questionner quant à l’intérêt de ces albums (étant donné que ceux-ci ont depuis été réédités en couleur). Ce qui en constitue l’attrait principal, c’est que les dessins d’Hergé ne sont pas tout à fait les mêmes que dans les rééditions ultérieures. Ainsi, dans l’édition de 1938 de « L’Ile Noire », les inénarrables jumeaux policiers Dupond et Dupont arborent des visages aux expressions martiales, pour ne pas dire belliqueuses, beaucoup plus prononcées, ce qui agrémente le récit d’un suspense supplémentaire. De même, le noir et blanc ajoute à l’ensemble de l’histoire une indéniable tension dramatique, qui est plus atténuée dans l’édition en couleur.
En dehors même de la superbe patine des pages et de l’évidente beauté plastique de ces albums, la rareté extrême de ces éditions constitue à elle seule une qualité primordiale pour tout collectionneur de Tintin qui se respecte ! D’autant plus que chaque album est agrémenté de quatre pages en couleur, où figurent plusieurs scènes-clés du récit (par exemple, le périple en avion de Dupond et Dupont dans « L’Ile Noire »), isolées de manière splendide, ce qui renforce l’aspect « culte » de ces éditions.
La Librairie Abraxas-Libris propose, outre un triptyque « collector » en noir et blanc ( »Le Sceptre d’Ottokar/ »Tintin en Amérique »/ »Le Crabe aux Pinces d’Or »), un coffret regroupant en petit format l’intégralité des éditions originales de Tintin. Il s’agit là, à n’en pas douter, d’une pièce maîtresse dans l’édition des œuvres d’Hergé, qui ravira aussi bien les collectionneurs aguerris que les néophytes émerveillés (« Tintin au Congo » mis à part, pour des raisons évidentes – Hergé s’est heureusement rattrapé ensuite avec le discours humaniste de « Coke en Stock« ). Grâce à cette magnifique entreprise de réédition, la magie de Tintin traverse, intacte et sans cesse renouvelée, les décennies pour se décliner dans tous les formats (dont le plus récent est une adaptation filmique des plus soignées par le grand Spielberg).
Entre autres raretés indispensables, Abraxas-Libris vend actuellement pas moins de neufs Tintin en langue bretonne (disponibles de manière limitée, puisque ce type d’ouvrage a pour habitude de partir très vite !), ainsi que divers trésors singuliers, tel que Tintin et moi : entretiens avec Hergé, le truculent Tintin & Co de Michael Farr, ou bien encore le somptueux album (60 vignettes couleurs) d’Hergé consacré à la Marine (des origines à 1700). Ces ouvrages rarissimes ont tendance à ne pas rester longtemps disponibles sur le site d’Abraxas-Libris : ainsi, les éditions noir et blanc de l’ « Ile Noire » et du « Lotus Bleu » ont d’ores et déjà trouvé preneur !