4 Mai 2016
Robes et femmes, 1913 : Enrico Sacchetti
Notre librairie vous propose aujourd’hui de découvrir un ouvrage rare et haut en couleurs. Il s’agit d’une publication, disons-le, rarissime d’art déco consacrée à la mode. Ouvrage qui n’est pas sans rappeler la superbe série « Mode et manières» (éditées par Pierre Corrard), dont nous avons parlé dans des précédents post.
La chemise cartonnée in-folio donne le ton et invite l’amateur à s’approcher. A l’intérieur, l’y attendent 13 éclatantes illustrations en couleurs, représentant des esquisses de mode. Les dessins, colorés au pochoir ont conservé une saisissante intensité. Sur quelques illustrations, des détails feutrés mettent en scène les modèles et ajoutent du charme aux tableaux. Parmi les 14 planches illustrées de « Robes et femmes », on note la présence d’une belle double-page.
L’ouvrage contient donc 16 feuillets indépendants, imprimés au recto. Avec la composition suivante : un frontispice, une page de titre, les 11 planches illustrées, le tout complété par la justification de tirage, limité à 300 exemplaires numérotés (le nôtre est le n°192). Chacune des pages de « texte » est illustrée. La gravure de mode apparaissant en couverture est également utilisée en page de titre. Chaque planche est signée de la main de l’artiste. L’ensemble présente une très belle qualité d’impression.
Enrico Sacchetti(1877-1967) est né à Rome, bien que sa famille soit Toscane. Il obtient d’abord un diplôme à l’Institut Technique, afin de répondre aux attentes de son père. Mais, initié dès le plus jeune âge à la peinture, il se tourne très vite l’art. Sacchetti trouve son premier travail dans des journaux milanais, en tant qu’illustrateur et caricaturiste. Par la suite, il deviendra un illustrateur publicitaire à succès. En 1908, il décide d’aller vivre en Argentine (où il dessine pour le journal « El Diario »), mais déçu par l’Amérique du Sud, il retourne en Europe 4 ans plus tard. A son retour, il s’installe quelques temps en France et devient créateur de mode. Il collabore alors avec Marinetti-considéré comme le père du futurisme, sur sa revue «Poesia». Lorsque la 1ère guerre mondiale éclate, il repart en Italie, où il dessine pour des revues, illustre des livres mais également des cartes postales. Sacchetti travaille aussi pour « La tradotta », version italienne de la célèbre revue de guerre « Troisième armée ».
L’esthétique d’Enrico Sacchetti est reconnaissable à son style graphique. En comparant « Robes et femmes » à «Modes et manières d’aujourd’hui» de R. Bonfils ou G. Lepape, on peut dire que Sacchetti interprète la mode de façon un peu plus légère, voire humoristique. Dans les deux cas, on retrouve un amour tendre pour les femmes. Les visages des modèles, leurs poses extravagantes et leurs silhouettes longilignes participent à cette impression. On note également la présence de fourrures, plumes, tuniques et turbans qui rappellent les créations avant-gardistes de Poiret, caractéristiques de l’époque. Un vrai régal pour les yeux !
6 Jan 2022
0 Comments
Livres illustrés modernes par François-Louis Schmied et Georges Barbier
Nous sommes dans les premiers jours de la nouvelle année, et avec elle nous accueillons la fin de la période des fêtes. Mais à la librairie Abraxas, c’est Noël toute l’année ! Découvrez ci-dessous les dernières nouveautés pour une sélection spéciale livres illustrés.
Vol de Nuit
Le livre présenté sur l’image ci-dessous fait partie d’un tirage limité à 35 exemplaires imprimés sur vélin en 2014 par Javier Martín Santos. Le fameux texte de Saint-Exupéry constituait initialement le sujet d’un projet de création de l’illustrateur François-Louis Schmied ; cependant, à sa mort en 1941, il n’avait eu le temps de réaliser que 5 aquarelles. Son fils Théo Schmied reprit le flambeau et termina le projet en 1947 ; celui-ci resta inédit jusqu’en 2014, jamais publié. C’est chose faite avec l’éditeur espagnol Javier Martín Santos : ce tirage présente le texte de Saint-Exupéry dans une reliure en demi-peau chagrinée noire, les plats de papier crème illustrés de filets et d’un bandeau bleu nuit traversé par un avion en pleine ascension dans un style typiquement Art Déco. Cet exemplaire, fourni avec son étui, porte le numéro 20 et s’accompagne d’un envoi et d’une esquisse de la main de l’artiste éditeur. Les 29 illustrations en couleurs (dont deux dessins en noir et blanc), parfaits témoignages du style épuré de Théo Schmied, complètent ainsi les aquarelles de son père, dont la patte se révèle plus détaillée. Ce tirage de Vol de Nuit est également augmenté d’un historique de l’édition, et des notices biographiques sur l’auteur et les deux illustrateurs.
Chansons de Tanger
A l’origine, les Chansons de Tanger sont une vingtaine de chants de femmes arabes traduits par Elisabeth Chimenti, traduction destinée à être publiée dans une anthologie sous la direction de Henri Duquaire. Ce dernier en a autorisé la publication pour une édition imprimée en 1939 par François-Louis Schmied au nom de M. Georges Desoubry. A cette occasion, Schmied avait également réalisé 21 illustrations en couleur à la détrempe. Son fils Théo Schmied réalisa la typographie selon la maquette du père. L’exemplaire unique de cette édition a été acquis par la BNF (Bibliothèque Nationale de France) en 1991. En 2013, Javier Martín Santos en réalise un nouveau tirage, un fac-similé limité à 99 exemplaires. L’ouvrage présenté dans l’image ci-dessous est le numéro 40. La traduction originale de Elisabeth Chimenti est augmentée d’un historique et de deux notices biographiques portant sur la traductrice et l’illustrateur, accompagnées de deux portraits photographiques en noir et blanc. Ces derniers ajouts sont également traduits en espagnol ; la traduction espagnole des chants se trouve également en annexe.
La Guirlande des Mois
Peut-être cette appellation vous paraît-elle familière : on retrouve quelques fois ces petits almanachs lors d’une vente, mais il est plus rare de tomber sur la collection intégrale. Nous avons la chance de vous présenter ici les cinq volumes, complets de leur jaquette et étui illustrés à l’exception de l’almanach de la première année 1917. La Guirlande des Mois a été publiée chez Jules Meynial à partir de 1917, en pleine Première Guerre Mondiale, et ce jusqu’à la publication du cinquième almanach en 1921. Cette collection se distingue par le charme et la préciosité de ses reliures, illustrées par des gravures de Georges Barbier imprimées sur soie tissée dans un style Art déco caractéristique des œuvres de l’illustrateur.
Peintre et dessinateur de mode, Barbier a fait carrière au début du XXème siècle. Il exposa régulièrement au Salon des artistes décorateurs. Il travailla souvent pour des revues de mode : le Journal des dames et des modes, la Gazette du Bon Ton, Femina, Vogue France… Il a également fait des incursions dans les mondes du théâtre, du music-hall et du cinéma en étant l’auteur de nombreux décors et costumes : Barbier est à l’origine des costumes portés par Rudolph Valentino dans le film Monsieur Beaucaire réalisé par Sidney Olcott en 1924.
Son style fleuri et printanier, les silhouettes déliées des figures féminines, les entrelacs alambiqués, que l’on retrouve avec la Guirlande des Mois, sont représentatifs du mouvement Art Déco qui était alors à son apogée lors de la publication des almanachs. On retrouve d’ailleurs, dans chacun des volumes, six planches coloriées au pochoir par l’illustrateur. Mais l’élégance de ces images ne constitue pas la seule particularité de la Guirlande des Mois. En effet, parmi les dessins de Barbier et les éléments que l’on peut s’attendre à trouver dans un almanach (calendrier ou feuilles de notes), les volumes de cette collection contiennent également des textes signés de plumes fameuses : Albert Flament, René Boylesve, Gérard d’Houville, Mme de Noailles, Edmond Jaloux…