12 Avr 2019
Du bon temps avec Proust
La « Fête du Livre » de Bécherel approchant à grands pas (20-22 avril 2019), il incombait à la Librairie Abraxas-Libris de promouvoir le thème élu pour cette 31ème édition, lequel est… le Temps, vaste et mystérieux sujet s’il en est. Depuis l’aube de la civilisation, ce concept n’a cessé de fasciner l’inconscient collectif, comme le prouve ce passage extrait du Mahâbhârata, l’un des plus anciens textes de l’humanité (rédigé en Inde il y a environ 2500 ans) :
« Le Temps emporte tout : être, non-être, joie et douleur. Le Temps crée, le Temps détruit, le Temps est le feu et le Temps l’éteint. Le Temps est dieu du Bien et du Mal. Le Temps fait éclore et le Temps arrache. Le Temps veille quand toutes les créatures dorment. Le Temps contient tout. Qui peut le contenir ? » (Traduction de Serge Démétrian – Albin Michel)
A plus de deux millénaires d’intervalle (un court trajet sur l’immense autoroute du Temps !), l’écrivain Marcel Proust (1871-1922) a lui aussi abordé avec brio ce thème universel dans son œuvre maîtresse, justement nommée « A la recherche du temps perdu » (roman en 7 tomes), où l’incomparable fraîcheur de sa poésie n’a d’égal que l’éclat majestueux de son style :
« Tous ses souvenirs […] qu’il avait réussi jusqu’à ce jour à maintenir invisibles dans les profondeurs de son être, trompés par ce brusque rayon du temps d’amour qu’ils crurent revenu, s’étaient réveillés et, à tire d’aile, étaient remontés lui chanter éperdument, sans pitié pour son infortune présente, les refrains oubliés du bonheur. Au lieu des expressions abstraites « temps où j’étais heureux », « temps où j’étais aimé », qu’il avait souvent prononcées jusque-là et sans trop souffrir, […] il retrouva tout ce qui de ce bonheur perdu avait fixé à jamais la spécifique et volatile essence […]. » (Du côté de chez Swann)
L’œuvre de Proust pourrait certes, par son ampleur, intimider le lecteur néophyte et le faire peut-être hésiter devant les 7 volumes d’ « A la recherche du temps perdu »… Et pourtant, il n’est que d’ouvrir une page au hasard pour être aussitôt charmé et subjugué par l’élégance royale de sa prose – c’est là, du reste, la marque infaillible des grands auteurs.
La Librairie Abraxas-Libris propose en vitrine un choix varié d’œuvres de Proust (dont les textes sont en parfaite harmonie avec le thème du Temps, retenu pour la « Fête du Livre »), dans des éditions anciennes de toute beauté qui combleront sans nul doute les passionnés de littérature !
30 Jan 2020
0 Comments
Les belles éditions d’après-guerre
Les éditions du Panthéon et la maison Athêna ont été fondées dans l’immédiat après-guerre, et ont connu leur riches heures de la fin des années 1940 à la fin des années 1950. Nées dans un Paris meurtri, ces deux maisons sont de celles qui redonnent des couleurs à un monde de l’édition particulièrement tourmenté pendant l’Occupation. En effet, nombre de professionnels du milieu se sont pliés aux injonctions allemandes et ont parfois édité des auteurs antisémites ou du moins acquis à la cause nazie. A contrario, d’aucuns refusèrent d’éditer, d’autres encore acquirent leurs lettres de noblesse en éditant des textes de résistants.
Après cette période de privation, le lectorat se tourne volontiers vers les ouvrages des collections « Athêna-luxe » (Athêna) et « Pastels » (Panthéon) qui publient principalement de beaux textes à succès d’avant la guerre. Les tirages sont volontairement limités, souvent numérotés et toujours très bien illustrés (Choppy, Edou Martin, Sornas, Gradassi…). Les impressions sont luxueuses sur de très beaux papiers (pur fil Johannot, alfa mousse navarre, velin chiffon Johannot).
Frontispices en couleurs, lettrines, bandeaux et culs-de-lampe se fondent à merveille dans ces exemplaires qui constituent un bon point de départ pour tout bibliophile.