7 Nov 2011
Quinzinzinzili ! Quinzinzinzili !
De la société du spectacle et de sa fin :
« Dans la période qui précéda immédiatement la deuxième guerre mondiale, l’opinion européenne sembla uniquement préoccupée de scandales qui n’avaient au fond qu’une importance minime, et auxquels d’ailleurs personne ne comprenait grand-chose… On ne pouvait jamais savoir sur le policier chargé de poursuivre les escrocs n’était pas à la solde du chef escroc, et l’on s’attendait à chaque instant à voir le ministre de la justice arrêté et conduit en prison par ses propres subordonnés… »
Ainsi commence le troisième chapitre de ce roman de Régis Messac. Je dois avouer que ce texte m’a évoqué une période plus récente. C’est la preuve de la modernité de ce court roman. Après avoir décrit rapidement et sans concession la vie sous la 3° république Régis Messac nous peint avec force les relations internationales de l’Europe et surtout de la France dans les années 30 : il cite Hitler, Léon Blum, Herriot et les journaux de son temps. Puis il imagine l’histoire de notre monde, les blocs qui s’affrontent et qui finissent pas se détruire. Se détruire totalement.
Si la première partie relève de la fiction politique, la seconde décrit le monde tel que le voit et le vit le narrateur : un « Monsieur tout le Monde » qui a survécu dans une grotte avec un poignée d’enfants. Ici l’auteur est acide, sans espoir et décrit la déchéance de l’Homme. La disparition de la civilisation. La plume de Régis Messac est dans ces pages proche de Delteil ou même de Céline. Certes, elle n’a pas la même intensité mais on y retrouve le même humour grinçant : « l’intelligence n’est pas très répandue dans le monde nouveau. Aussi on y est grand homme à bon compte. Les cavernicoles deuxième série voient du génie partout. Ils ont l’enthousiasme facile, et tombent en extase pour rien, devant les futilités, des niaiseries. Le moindre geste, le plus petit incident prennent des proportions épiques. » Le pessimisme qui en ressort est rendu léger par la verve mais le constat est grave et comme dans sa Majesté des Mouches les enfants régressent.
Alors pourquoi lire Messac. A cause du contexte historique et de son antériorité aux livres de la même veine et pour son écriture, surtout. Elle surclasse de loin les autres auteur de romans post-apocalyptique. La deuxième partie aurait pu être mis en scène par Blier. On cite souvent en rapport : Merle (Malvil), Golding mais tout ceux-là ont écrit après la seconde guerre mondiale au court de laquelle il trouva la mort, dans un camp de concentration. Quant à « La route » de MacCarty elle est reléguée au rang de superproduction américaine. On relira également pour faire le début du tour de la question « un cantique pour Leibowitz » (1952) de Walter M. Miller et » Les grands moyens » de Roger Ikor (1952), et Jacques Spitz : La guerre des Mouches qui lui date de 1938.
Nous alimentons en permanence notre rayon concernant la SF d’avant guerre et notamment les grands auteurs français comme Regis Messac. Pour les retrouver en ligne c’est ici et à la librairie ou vous trouverez en rayon tous les ouvrages disponibles des éditions ex-nihilo qui s’attache à rééditer toutes les oeuvres de Messac.
29 Nov 2011
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Napoléon dans l’autre monde relation écrite par lui même et trouvée à Ste Hélène, au pied de son tombeau
Au milieu de la centaine d’ouvrages nouveaux sur Napoléon et sur le premier empire se trouvait l’ouvrage dont le titre est en tête de ce post.
Politicopolis vue par Napoléon lors de son voyage dans l'autre monde
Cet ouvrage Swiftien (Politicopolis fait fortement penser à l’Ile volante de Lagado) où Napoléon arrivé dans l’autre monde visite une ville nommée Politicopolis accompagné par un pur esprit que lui seul peut voir et avec qui il peut échanger sans être entendu, est supercherie littéraire qui à travers Napoléon s’attaque à tous les grands de ce monde. La cible principale n’en reste pas moins Napoléon. Il y rencontre de nombreux personnages historiques avec lesquels il évoque l’histoire de ce monde. L’auteur est très cultivé et le montre. On trouvera d’ailleurs en fin d’ouvrage une table des matières qui liste les personnages cités et rencontrés dans le livre.
Une petite citation s’impose pour donner le ton de l’ouvrage : après une longue conversation avec Elisabeth I d’Angleterre qui se finit par la décapitation de la reine vierge par le Pape Sixte V.
« Nous voilà dans la foule pressés, coudoyés par toutes sortes de gens. Un nègre se trouva nez à nez avec moi, me reconnut, et se disposait à me frapper ; mais Franceschi, l’ayant touché avec verge de fer, le terrassa en un clin-d’oeil : je le regardait attentivement, et reconnut Toussaint l’Ouverture. Quoi ! lui-dis je, ta haine envers moi, dure, même au-delà du tombeau ? Assurément dit-il, car je te regarde comme le plus grand ennemi de la liberté ! au moins les royalistes de 91 ont toujours été royalistes ; moi, j’ai toujours été Républicain ainsi que tant d’autres ; mais toi qui es-tu ? un monstre amphybie, né pour le malheur de l’Europe ; une âme pétrie d’ambition et d’égoïsme, qui dans une révolution aussi importante que celle de France, n’a vu qu’un seul but – ton aggrandissement et celui des sots de ta famille. Le bien général n’a aucune part dans tes actions…. Ce n’est pas de mon emprisonnement au fort de Joux, ni de ma mort violente dont je me plains, les tyrans agissent toujours en tyrans ; je me révolte seulement avec raison de ce que ton hypocrisie politique a fini par chasser la liberté de l’Europe entière ; il fallait aux français l’âme d’un Caton, tu as eu celle d’un César !… Mieux, eut-il valu pour le bien des nations que Robespierre regnât au lieu de toi ? … » et la conversation continue…
Absent du dictionnaire Napoléon de Jean Tulard, absent du Blavier sur les fous littéraires, absent de Versin, on ne le peut confondre avec le Discours prononcé dans l’autre monde pour la réception de Napoléon Bonaparte le 5 mai 1821… celui-ci ne faisant que 25 pages. Nous avons consulté la première édition de Histoire plaisante et récréative de Napoléon dans l`autre monde imprimé par Périquet en 1835, exemplaire de la BNF, celui-ci ne fait que 53 pages et n`a aucun rapport avec le texte que nous possédons, c`est un conte fantastique : Napoléon et son armée arrivent sur la lune et s`installe chez les habitants, y font la guerre et finissent par se marier avec les filles du roi. Absent de BNF et du CCFR mais présent à la British Library (un seul exemplaire). Le bibliothécaire lui attribue même comme auteur (avec un point d’interrogation le Baron A. H. de Jomini). Inconnu de Monsieur Tulard qui nous a aimablement répondu et qui voit mal Jomini en être l`auteur. Mais présent dans Chantal Prévot « Napoléon en exil à Sainte-Hélène. 1re partie : le temps de l’exil », Napoleonica. La Revue 2/2011 (N° 11), p. 32-150. ICI.